Entre rêves et réalités : les défis quotidiens des étudiants internationaux en Occident
Imaginez un monde où vous êtes entouré de vos proches, des personnes qui vous aiment et que vous aimez en retour. Certains se sont naturellement rapprochés de vous, brisant les barrières de votre intimité et de votre discrétion. Ce ne sont plus des ami·es, ce sont des frères et des sœurs. D'autres, devenus par la force des circonstances, des parents de substitution, des conseillers, des psychologues… Bref, une famille élargie et choisie.
Prendre la décision de partir étudier à l'étranger, c’est accepter de s’éloigner de tous ces liens tissés au fil des années. C’est faire le deuil, au moins temporairement, de certaines relations, en espérant qu'elles survivent à la distance. C’est aussi affronter la possibilité que certains vous oublient, vous ignorent ou coupent tout lien. C’est croire, parfois naïvement, que d'autres prendront leur place là-bas. Vous l’aurez compris : c’est un départ vers l’inconnu, une quête de meilleures perspectives, de formations ou d’un avenir professionnel plus prometteur. Mais même si l’intention est bonne, tout ne se passe pas toujours comme prévu.
Chaque année, des milliers d'étudiants quittent l'Afrique, pleins d’espoir
Chaque année, des milliers de jeunes Africains prennent la route de l’Occident dans l’espoir d’une vie meilleure. Ce départ est souvent porté par une mission implicite : celle d’aider la famille restée au pays. "Tu es l’espoir de la famille", "Ne nous oublie pas", entend-on à l’aéroport ou au dernier repas partagé avant le départ. Ces mots, empreints d’amour, donnent aussi à cette aventure tout son poids, toute sa gravité.
Mais une fois sur place, la réalité frappe. L’isolement, la précarité, la charge mentale, les contraintes administratives et la pression sociale transforment souvent les rêves en cauchemars. Ces conditions bouleversent les projets initiaux et conduisent parfois à des choix douloureux.
Des rêves brisés, des parcours recalculés
Joseph, arrivé en France pour faire des études de droit et devenir avocat, a échoué à deux reprises à ses examens. Sous la double pression de sa famille et de l’administration française, il a dû se réorienter vers une formation en entretien industriel. Aujourd’hui, il travaille dans ce secteur depuis plusieurs années. Son rêve ? Recalibré, brisé.
Malik, quant à lui, rêvait de devenir ingénieur. Mais entre les heures de travail acharné pour payer son loyer, les transferts d’argent mensuels vers sa famille, et le manque de soutien moral, il a été renvoyé de l’université. Aujourd’hui, il est conducteur Uber, sans regrets apparents, mais avec une profonde fatigue et un sentiment d’inachevé.
Pression sociale et familiale, déception, dépression : quand le retour devient une échappatoire
Mamadou, un Sénégalais d’une quarantaine d’années, a passé dix ans en Europe. Il est finalement retourné vivre au Sénégal, incapable de continuer à faire face à la précarité, à la solitude et au manque de ressources. Divorcé, en situation irrégulière pendant plusieurs années, il confie être tombé dans une profonde dépression. Le retour n’était plus un choix, mais une nécessité.
Ces situations ne sont pas isolées. Elles révèlent un phénomène plus large : le fossé entre les attentes placées dans la migration et la réalité du terrain. Trop souvent, les départs sont précipités, mal préparés, fondés sur des illusions ou des témoignages embellis. Le manque d’information, de soutien psychologique, de réseau, mais aussi de maturité, joue un rôle central dans ces trajectoires brisées.
Le retour : un échec ou un nouveau départ ?
Pour beaucoup, retourner au pays est perçu comme un échec. Un de nos interlocuteurs l’a dit sans détour : "Revenir, c’est perdre la face." Cette vision empêche de nombreuses personnes de rentrer, même lorsque la situation est devenue intenable à l’étranger. Elles restent, parfois dans l’ombre, enchaînant les petits boulots, les formations sans débouchés, les démarches administratives interminables.
Mais ce retour, que l'on voit comme une fin, peut aussi être un nouveau départ. Il mérite d’être dédramatisé, revalorisé. On devrait pouvoir revenir sans honte, sans stigmatisation, et surtout sans culpabilité.
Quoi qu’il en soit, voyager dans un pays étranger est nécessaire pour apprendre, découvrir et se surpasser. C’est de loin l’une des meilleures façons de se responsabiliser et d’atteindre, à un rythme accéléré, une plus grande maturité. Comme toute aventure, au milieu des ronces et des épines, les difficultés ne manquent pas, mais la volonté de réussir et de voir le bout du tunnel devrait vous pousser à adopter une discipline hors du commun. Enfin, partir n’a jamais été mauvais, et revenir l’est encore moins.